Le 19 juin 1940. Le Lieutenant Jacques Desplats est installé dans son poste de commandement dans la ferme de Mr et Mme Surbal sur l'île de Gennes, sur la Loire. Il y a 2 jours, le 17 juin, alors que le général Pétain demandait aux soldats de « cesser le combat », le commandant de l’École de Cavalerie de Saumur, le colonel Michon, demandait à ses élèves, aux cadres et instructeurs de l’École, si ils voulaient se joindre à lui et honorer les ordres donnés il y a quelques jours : la défense des ponts de la Loire. Tous répondirent par l'affirmative.
Depuis le haut de la colline de l'église St Eusèbe, vue sur le pont sud, l'île de Gennes et en arrière-plan, la rive nord avec Les Rosiers-sur-Loire. |
Le même jour, le général allemand Von Both, commandant le I.Armeekorps décide de prendre les ponts sur la Loire le plus rapidement possible et met en marche sa 1. Infanterie-Division vers les Ponts-de-Cé, près d'Angers, via La Flèche, et sa 11.Infanterie-Division vers Gennes via Le Lude.
Du coté français, l’École de Cavalerie de Saumur est en charge de défendre un secteur qui s'étend du Thoureil à l'ouest, jusqu'à Montsoreau à l'est, soit environ 40km le long de la Loire. En plus des 790 Élèves Aspirants de Réserve (EAR) de l'école, des groupes plus ou moins disparates les rejoignent, portant le nombre d'hommes à près de 2500, appuyé de 24 blindés, 5 canons de 75, 13 canons antichars (dont du 25mm) et une quinzaine de mortiers.
Dans le secteur de Gennes vont venir s'établir la Compagnie du Train du lieutenant Roimarmier, 120 hommes divisés en 4 brigades, qui possède 4 mitrailleuses et 11 fusils-mitrailleurs. A eux de tenir la Loire entre Le Thoureil et Gennes.
Sur l'île de Gennes même se trouve la brigade Desplats. Le Lieutenant possède avec lui, outre son chien « Nelson », un airedale, 25 EARs ainsi qu'une quarantaine de tirailleurs algériens commandés par l'adjudant-chef Ritter. Desplats possède pour ses hommes 2 mitrailleuses, 7 fusils-mitrailleurs, 1 canon de 25mm, 1 mortier de 81mm et 1 mortier de 60mm. Il les dispose de façon à couvrir la rive droite de la Loire, mais surtout à défendre les ponts. La disposition est la suivante :
- un FM sur appui, pointé vers le ciel en guise de défense anti-aérienne, servi par l'EAR Cottin
- un FM à l'extrémité ouest de l'île, servi par l'EAR Jean-Louis Dunand
- un FM près du pont des Rosiers sur Loire servi par l'EAR Guy Roland-Gosselin
- une mitrailleuse de chaque coté de la route traversant l'île, la première à gauche servie par l'EAR De Farcy, chef de pièce, l'EAR Deutz d'Arragon comme chargeur, et enfin l'EAR de Bellaing (17 ans!) comme tireur. Celle de droite est servie par les EARs Gabriel de Pontavice, Jacques de Ladoucette et Bertrand du Vivier.
- les deux mortiers en retrait des mitrailleuses
- la pièce antichar de 25mm sur la rive gauche, en face du carrefour « du bord de l'eau », prenant en enfilade les ponts, servie par les EAR Pineau et Didier Flandin.
Desplats a installé son PC dans une ferme sur l'île avec son adjoint le Maréchal des Logis Braillard, le lieutenant du Génie Falk, chargé de superviser la destructions des ponts, et l'EAR Bontoux, chargé des communications avec une radio ER12 tellement capricieuse qu'elle finira par rendre l'âme avant même les combats.
Vers l'est enfin, le groupe du commandant Hacquard, 260 hommes du 19e régiment de Dragons, a la charge de patrouiller le long de la Loire, de Gennes jusqu'au hameau de La Mimerolle, soit 8kms de rives. Le commandant Hacquard s'installe au château de Chênehutte. Il possède avec lui 3 chars H35, 3 H39, des mortiers de 60 et 10 mitrailleuses.
Enfin, en réserve mobile, prêt à intervenir, l'escadron du capitaine Foltz, ancien de 14-18. Son escadron, fort de 145 hommes, est divisé en 5 brigades : Ravier, Bonnin, Pasquet, de Parcevaux, de Galbert. En plus de deux canons de 25mm, l'escadron Foltz possède trois auto-mitrailleuses.
Le flux des réfugiés s'est peu à peu tari, jusqu'à devenir presque inexistant le 19 juin. Les allemands s'approchent.
En face des défenseurs de l'île et du village de Gennes va bientôt se trouver le Vorausabteilung Seherr, du nom du Rittmeister (capitaine) Von Seherr. Von Seherr s'est vu confier le commandement d'une avant-garde motorisée. Leur but : arriver le plus vite possible au pont de Gennes afin de le sécuriser.
Composé d'unités divers, Vorausabteilung Seherr est motorisée afin d'arriver au plus vite sur son objectif. On y trouve :
- la compagnie cycliste d'armes lourdes divisionnaire
- une compagnie portée (sur camion) de 4 sections de fusiliers et une section de mitrailleuses lourdes
- un peloton motocycliste
- un escadron d'armes lourdes d'un groupe de reconnaissance avec canons de 75mm
- la compagnie antichar divisionnaire avec des canons de 37mm
- un section du génie
- une batterie de pièces de 150mm
- un service de santé
Von Seherr part depuis Charbonnières, dans la Sarthe, dans la nuit du 18 au 19. Environs 150 kms les séparent de Gennes. L'avant-garde se met en marche avec plusieurs jours de ravitaillement. Elle passe par Le Lude et s'élance vers la Loire.
A Gennes, Desplats et le lieutenant Falk du Génie comprennent que les allemands se rapprochent. Décision est prise, il est temps de faire sauter le pont nord avant qu'il ne soit trop tard.
Alors que la mise a feu est enclenchée, un homme s'avance sur le pont avec une petite fille, courant vers l'île de Gennes. Les tirailleurs leur crient de faire demi-tour. Il est trop tard. Il est 16h, le pont nord de Gennes vient de sauter. Un soldat, Marcel Dizier, reçoit probablement un éclat qui le blesse. Il mourra de ses blessures. C'est, avec l'homme et la petite fille du pont, la première victime de la défense des ponts de Gennes.
Les premiers éléments du Vorausabteilung Seherr arrivent près des Rosiers vers 18h. Il est trop tard, le pont est détruit. Il va falloir traverser la Loire qui, en plein mois de juin 1940, n'est pas a son plus haut niveau. Des bancs de sable affleurent par endroit, notamment près de l'île, qui pourraient permettre aux soldats allemands d'y prendre pied plus facilement.
Du coté français, l’École de Cavalerie de Saumur est en charge de défendre un secteur qui s'étend du Thoureil à l'ouest, jusqu'à Montsoreau à l'est, soit environ 40km le long de la Loire. En plus des 790 Élèves Aspirants de Réserve (EAR) de l'école, des groupes plus ou moins disparates les rejoignent, portant le nombre d'hommes à près de 2500, appuyé de 24 blindés, 5 canons de 75, 13 canons antichars (dont du 25mm) et une quinzaine de mortiers.
Dans le secteur de Gennes vont venir s'établir la Compagnie du Train du lieutenant Roimarmier, 120 hommes divisés en 4 brigades, qui possède 4 mitrailleuses et 11 fusils-mitrailleurs. A eux de tenir la Loire entre Le Thoureil et Gennes.
Jacques Desplats, entre 1935 et 1937, lors de son passage à l'Ecole militaire de Saint-Cyr. |
Sur l'île de Gennes même se trouve la brigade Desplats. Le Lieutenant possède avec lui, outre son chien « Nelson », un airedale, 25 EARs ainsi qu'une quarantaine de tirailleurs algériens commandés par l'adjudant-chef Ritter. Desplats possède pour ses hommes 2 mitrailleuses, 7 fusils-mitrailleurs, 1 canon de 25mm, 1 mortier de 81mm et 1 mortier de 60mm. Il les dispose de façon à couvrir la rive droite de la Loire, mais surtout à défendre les ponts. La disposition est la suivante :
- un FM sur appui, pointé vers le ciel en guise de défense anti-aérienne, servi par l'EAR Cottin
- un FM à l'extrémité ouest de l'île, servi par l'EAR Jean-Louis Dunand
- un FM près du pont des Rosiers sur Loire servi par l'EAR Guy Roland-Gosselin
- une mitrailleuse de chaque coté de la route traversant l'île, la première à gauche servie par l'EAR De Farcy, chef de pièce, l'EAR Deutz d'Arragon comme chargeur, et enfin l'EAR de Bellaing (17 ans!) comme tireur. Celle de droite est servie par les EARs Gabriel de Pontavice, Jacques de Ladoucette et Bertrand du Vivier.
- les deux mortiers en retrait des mitrailleuses
- la pièce antichar de 25mm sur la rive gauche, en face du carrefour « du bord de l'eau », prenant en enfilade les ponts, servie par les EAR Pineau et Didier Flandin.
Desplats a installé son PC dans une ferme sur l'île avec son adjoint le Maréchal des Logis Braillard, le lieutenant du Génie Falk, chargé de superviser la destructions des ponts, et l'EAR Bontoux, chargé des communications avec une radio ER12 tellement capricieuse qu'elle finira par rendre l'âme avant même les combats.
Enfin, en réserve mobile, prêt à intervenir, l'escadron du capitaine Foltz, ancien de 14-18. Son escadron, fort de 145 hommes, est divisé en 5 brigades : Ravier, Bonnin, Pasquet, de Parcevaux, de Galbert. En plus de deux canons de 25mm, l'escadron Foltz possède trois auto-mitrailleuses.
Le flux des réfugiés s'est peu à peu tari, jusqu'à devenir presque inexistant le 19 juin. Les allemands s'approchent.
En face des défenseurs de l'île et du village de Gennes va bientôt se trouver le Vorausabteilung Seherr, du nom du Rittmeister (capitaine) Von Seherr. Von Seherr s'est vu confier le commandement d'une avant-garde motorisée. Leur but : arriver le plus vite possible au pont de Gennes afin de le sécuriser.
Composé d'unités divers, Vorausabteilung Seherr est motorisée afin d'arriver au plus vite sur son objectif. On y trouve :
- la compagnie cycliste d'armes lourdes divisionnaire
- une compagnie portée (sur camion) de 4 sections de fusiliers et une section de mitrailleuses lourdes
- un peloton motocycliste
- un escadron d'armes lourdes d'un groupe de reconnaissance avec canons de 75mm
- la compagnie antichar divisionnaire avec des canons de 37mm
- un section du génie
- une batterie de pièces de 150mm
- un service de santé
Von Seherr part depuis Charbonnières, dans la Sarthe, dans la nuit du 18 au 19. Environs 150 kms les séparent de Gennes. L'avant-garde se met en marche avec plusieurs jours de ravitaillement. Elle passe par Le Lude et s'élance vers la Loire.
A Gennes, Desplats et le lieutenant Falk du Génie comprennent que les allemands se rapprochent. Décision est prise, il est temps de faire sauter le pont nord avant qu'il ne soit trop tard.
Alors que la mise a feu est enclenchée, un homme s'avance sur le pont avec une petite fille, courant vers l'île de Gennes. Les tirailleurs leur crient de faire demi-tour. Il est trop tard. Il est 16h, le pont nord de Gennes vient de sauter. Un soldat, Marcel Dizier, reçoit probablement un éclat qui le blesse. Il mourra de ses blessures. C'est, avec l'homme et la petite fille du pont, la première victime de la défense des ponts de Gennes.
Les premiers éléments du Vorausabteilung Seherr arrivent près des Rosiers vers 18h. Il est trop tard, le pont est détruit. Il va falloir traverser la Loire qui, en plein mois de juin 1940, n'est pas a son plus haut niveau. Des bancs de sable affleurent par endroit, notamment près de l'île, qui pourraient permettre aux soldats allemands d'y prendre pied plus facilement.
Vue de la Loire vers l'île, comme les allemands l'auraient traversé en juin 1940. Photo de Google Street View de juin 2019. Sur la gauche, le clocher de l'église St Eusèbe au fond et le pont nord. |
Il est environ 21h quand la première attaque allemande s'élance à travers la Loire, à l'ouest du pont détruit. Les tirailleurs ripostent. L'EAR Guy Toulouse lâche rafales après rafale avec son fusils-mitrailleurs, l'EAR de Beaufort l'imite en tirant coup par coup avec son MAS 36. Le lieutenant Desplats organise la défense. Les allemands tentent de prendre pied sur un banc de sable. Desplats ordonne de mettre les baïonnettes, mais finalement le feu des français est trop important. Les envahisseurs font demi-tour, après avoir essuyé de lourdes pertes. Malgré cette première victoire, le lieutenant Desplats ne baisse pas sa garde. Il doit ordonner à ses mitrailleurs de cesser le feu à plusieurs reprises, notamment contre une auto-mitrailleuse sur la rive opposée. Il s'agit de ne pas gâcher des munitions, et de ne pas dévoiler sa position. La radio ne marchant toujours pas, il prend le téléphone et contact la poste de Gennes, dont les employés travaillent toujours malgré le bombardement allemand de la ville. On lui passe le capitaine Foltz. Desplats le rassure en lui louant la très bonne conduite de ses hommes pour leur première expérience sous le feu. Puis, un obus coupe la ligne téléphonique. Elle ne sera plus rétablie.
Illustration de la défense de l'île de Gennes par Geoffroy de Navacelle, EAR de la 17e brigade. |
Peu de temps après, vers 23h, les allemands retentent une traversée. Nouvel échec, malgré l'appui de leur artillerie qui bombarde copieusement l'île. Mais la fusillade a été vive. Un tirailleur, Mohamed Dachir, a été tué, et l'adjudant-chef Ritter est blessé, ainsi qu'un EAR, Joseph Lemaître.
Dans le chaos du bombardement et de la fusillade, qu'a pensé Falk, l'officier du Génie chargé de la destruction du pont sud, a-t-il eu peur que des éclats endommagent son dispositif ? Toujours est-il qu'alors que l'attaque allemande se termine, le pont sud saute. La brigade du lieutenant Desplats est maintenant coupée de tout renforts et ravitaillement, bloquée sur l'île. Il n'y a plus de retraite possible.
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La suite dans la partie 2 du combat de Gennes
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