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Combat de Gennes, partie 2

Le capitaine Foltz, n'ayant plus de nouvelles de Desplats depuis la seconde attaque allemande (voir partie 1 des combats de Gennes), est inquiet. Vers 23h, il demande alors à la brigade Galbert et son peloton moto d'aller soutenir, si besoin, les défenseurs de l'île. Galbert arrive à Gennes, nous sommes maintenant le 20 juin 1940. Il y rencontre les EARs Bontoux et Brousset, qui sur ordre de Desplats, ont traversé le bras sud de la Loire en barque pour évacuer l'adjudant-chef Ritter et deux autres blessés. Ils lui donnent une estimation des forces allemandes. Galbert envoie des hommes prendre contact avec la compagnie Roimarmier, puis traverse la Loire pour rejoindre Desplats et évaluer la situation. Il quitte l'île juste avant le déclenchement de la troisième attaque allemande, ramenant le corps de Mohamed Dachir, tué lors du premier assaut, et Marcel Dizier, gravement blessé. Pour Desplats et ses hommes, bloqués sur l'île, sans renforts et ravitaillements, c'est le baroude d'honneur.

Localisation des différents lieux de Gennes évoqués dans cet article.

Des embarcations débarquent des soldats allemands sur les bancs de sables, et ceux-ci réussissent à y prendre pied sous les tirs des français. Les allemands peuvent alors s'infiltrer dans l'île. Les combats se font désespérés. Desplats est tué par un obus alors qu'il tente d'organiser la défense. Son second, le maréchal des logis Braillard, se défend à la grenade avant de succomber. L'EAR Brasseur est tué. Alors qu'il se jette dans la Loire gravement blessé, l'EAR Roland-Gosselin se fait mitrailler depuis l'île et son corps ira s'échouer à l'Abbaye de Saint-Maur. L'EAR Dunant reçoit un éclat mortel à la tête. Les derniers défenseurs se replient vers le sud-est de l'île, mais se retrouvent encerclés. Les EARs Beaufort et Cottin décident de prendre le risque de traverser la Loire pour rejoindre la rive sud. Ils trouvent une barque et arrivent à dériver jusqu'aux lignes amis. Les autres défenseurs, dont les servants des mitrailleuses, sont fait prisonniers. Il est 6h, l'île de Gennes est tombée.

Croix et plaques en souvenir du Lieutenant Desplats et de ses hommes,
tombés sur l'île de Gennes

Pendant ce temps, vers 4h du matin, le capitain Foltz reçoit l'ordre de se diriger sur Gennes, afin de prévenir tout débarquement allemand sur la rive sud ou de bloquer celui-ci en cas de débarquement en bloquant les routes sortants de Gennes. On lui promet un appui d'artillerie avec trois canons de 75mm, qui n'arriveront jamais.

Situation vers 6h du matin, après l'attaque allemande sur l'île.

A son arrivé, Foltz décide de déployer la brigade Galbert à droite du pont, le long de la Loire, ainsi que les brigades Bonnin et Pasquet sur la gauche avec les mitrailleurs de la brigade de Parcevaux intercalés entre les deux. La brigade Ravier est déployée près de l'église St Vétérin, dans le bourg, pour défendre les routes sortant de Gennes. Le déploiement des troupes le long de la Loire se fait sous le feu nourri de l'artillerie et des mitrailleuses allemandes qui commencent à s'installer sur l'île. Le Carrefour du Bord de l'eau est sous le feu allemand. Les hommes le traversent par bonds, en petits groupes, avec discipline et sang-froid, afin de prendre position sur la rive à gauche du pont. Dans cette même matinée, le lieutenant Roimarmier est tué par un obus, vers son poste de commandement, à la villa Montebello.

Situation dans la matinée du 20 juin 1940.

Les allemands, désormais maîtres de l'île, tentent alors de traverser vers la rive sud, de part et d'autre du pont, mais le feu des hommes de l'escadron Foltz les en dissuade. Ils tentent alors de prendre pied au nord, dans le secteur de la compagnie du train de Roimarmier, et au sud, dans le secteur du groupe Hacquard. La pression allemande et la mort du lieutenant Roimarmier font que certains des hommes de la compagnie du train se sont retirés de leurs positions. Les allemands sont alors capable de prendre pied entre Gennes et Le Thoureil et de s'infiltrer au nord de Gennes.


Vers 8h, inquiet de la situation au nord, Foltz ordonne à Galbert d'envoyer une partie de ses hommes à gauche de la brigade Pasquet, pour tenir la route de Gennes au Thoureil. A 9h, les allemands retentent une traversée sur la droite du pont. Une douzaine d'homme est envoyée sur l'ancien chemin de Saumur afin de les repousser, mais seul cinq arrivent près de la Loire et tentent de contenir l'ennemi. Celui-ci met de plus en plus de pression depuis le nord, du coté du domaine de la Boussinière.

Situation vers 12h

Vers 11h, la situation des français est plus que préoccupante. Les derniers hommes de la brigade Desplats, déployés près du carrefour, au canon de 25, commencent à tomber les uns après les autres : Pineau et Flandin sont tués, Gourdain est blessé, seuls Chakoff et Lesourd tiendront la position jusqu'à 16h quand ils seront forcés de se retirer sous le feu allemand. Par crainte d'infiltrations ennemies dans Gennes, on barricade certaines routes et on surveille particulièrement la route de repli qui mène à Milly-le-Meugon. Vers 12h, le lieutenant Galbert ordonne un repli limité juste en arrière du fleuve vers de meilleurs positions défensives, qui se termine en un repli plus important que prévu vers le centre de Gennes. Dans les mêmes instants, alors qu'il se trouve près du carrefour du Bord de l'eau, à l'orée de l'ancien chemin de Saumur, le lieutenant Bonnin est tué d'un coup de feu tiré par un homme à bout portant. L'homme sera tué par l'EAR Labuzan, qui sera lui-même blessé.

Si la situation française paraît désespérée, ce qui était à prévoir au vu contexte, les allemands ne sont pas ravi de leur propre situation. Ils savent maintenant qu'ils ont à faire à des élèves de l'Ecole de Cavalerie (et pensent-ils, à d'autres tirailleurs algériens). Ils sont même impressionnés par l'excellente adresse au tir de leurs opposants et rapportent des tirs précis dans les ouvertures des bâtiments qu'ils utilisent comme poste d'observation aux Rosiers. Afin d'augmenter la pression sur les défenseurs de Gennes, le général Kleffel ordonne de renforcer le Vorausabteilung Seherr : le second bataillon de l'Infanterie-Regiment 22, la 14. Kompanie et une batterie de pièces de 75mm, le tout sous les ordres de l'Oberstleutnant Knobelspies, est envoyé aux Rosiers. Les renforts partent du Lude à 12h30, avec en priorité la 8.Kompanie équipée de mortiers de 81mm et la batterie de 75mm. Knobelspies veut pouvoir utiliser sa puissance de feu supérieure le plus rapidement possible. Les premières troupes arriveront aux Rosiers à 19h, les dernières vers 23h30.

Situation vers 16h, lors de la contre-attaque française.

Coté français, un peloton du groupe-franc du capitaine de Neuchèze est envoyé par le commandement supérieur afin de soutenir l'Escadron Foltz à Gennes. Celui-ci comporte deux chars ACG1. Foltz ordonne alors à Galbert de contre-attaquer avec l'aide des renforts et de reprendre les positions perdues. Il est environ 16h. Au même moment, le lieutenant de Parcevaux reçoit l'ordre de contre-attaquer vers la propriété du château de Joreau, afin de contenir ou repousser l'ennemi qui a pu s'infiltrer grâce à la retraite en début d'après-midi du groupement Hacquard. Cette contre-attaque permets de reprendre un peu de terrain, notamment vers le carrefour du Bord de l'eau. Les allemands sont tenus en échec et passent le reste de la journée à renforcer leurs positions, tout en planifiant une nouvelle attaque pour le 21 juin, grâce aux renforts de l'Oberstleutnant Knobelspies.

Vue de la rive sud de la Loire, avec le pont sud détruit
et les ruines du clocher de l'église St Eusèbe.

Malgré le succès relatif de la contre-attaque et la bonne défense de l'est de Gennes par la brigade de Parcevaux, la situation française est intenable. Non seulement les allemands ont pu s'infiltrer en force dans les intervalles entre Gennes et Saumur, mais il n'y a plus de réserve, toutes les unités ayant été engagées ou s'étant retirées. Le bombardement reprend de plus belle grâce aux mortiers et à l'artillerie des renforts allemands. Ceux-ci tirent vers le clocher de l'église Saint-Eusèbe, pour éviter son utilisation comme point d'observation. Un obus décapite le clocher vers 20h. Foltz reçoit des nouvelles du commandant Hacquard qui lui conseil de se replier, Saumur est tombé.

En début de soirée, les allemands sont surpris. Les français font feu depuis nombre de positions. Ces derniers coups tirés sont là pour couvrir la retraite des troupes qui s’amorce. L'artillerie allemande répond en visant les positions françaises. La retraite des hommes de l'escadron Foltz se fait sous le feu ennemi, mais sans perte notable. Il est dans les environs de 21h, la ville est vide de soldats français, le combat de Gennes est terminé.


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